Vente d’entreprise et plus-value : « c’est quoi déjà une entreprise » ?

Vente d’entreprise et plus-value : « c’est quoi déjà une entreprise » ?

Un exploitant agricole qui envisage de mettre un terme à son activité cède à son fils, également exploitant agricole, la totalité de son matériel professionnel. Il conserve en revanche la propriété des bâtiments d’exploitation qu’il loue, pour 9 années, à son fils. Parce que la valeur de cette vente est inférieure à 300 000 €, il demande à bénéficier d’une exonération d’impôt… ce que l’administration lui refuse. Pourquoi ?


Et si vous ne vendez pas vos bâtiments d’exploitation ?

Un exploitant agricole passe la main à son fils, lui-même exploitant agricole, et lui vend son matériel professionnel, tout en conservant la propriété des bâtiments agricoles (hangar, chaufferie, bâtiment de stockage, etc).

La valeur de la vente étant inférieure à 300 000 €, le vendeur demande à bénéficier de l’exonération d’impôt sur la plus-value réalisée qui s’applique en pareil cas.

Refus de l’administration qui rappelle que si l’avantage fiscal impose que la vente soit réalisée pour un montant inférieur à 300 000 €, ce n’est pas la seule condition à respecter. Il faut aussi que la vente porte sur une « entreprise » ou sur une « branche complète d’activité ».

Pour mémoire, une « branche complète d’activité » se définit comme l'ensemble des éléments d'actif et de passif d'une division d'une entreprise ou d'une société qui constituent, du point de vue de l'organisation, une exploitation autonome, c'est-à-dire un ensemble capable de fonctionner par ses propres moyens.

Ici, force est de constater qu’en ne cédant à son fils que le matériel, sans les bâtiments, le vendeur n’a cédé ni une entreprise, ni une branche complète d’activité susceptible d’être exploitée de façon autonome. Pour l’administration, en effet, l’absence de cession des bâtiments empêche le fils d’exploiter l’activité agricole dans les mêmes conditions que son père.

Certes, répond le vendeur, qui précise néanmoins que les bâtiments en question sont loués à son fils, sous couvert d’un bail longue durée de 9 ans…reconductible le cas échéant.

Une précision importante pour le juge suprême qui considère que le fait, pour le vendeur, de ne pas avoir transmis à son fils les bâtiments d’exploitation, n’est pas un élément suffisant pour faire échec au bénéfice de l’exonération d’impôt.

Dès lors, il renvoie l’affaire en cour d’appel pour que celle-ci détermine si la vente du matériel d’exploitation, accompagnée d’une location longue durée des bâtiments, suffit à prouver que le vendeur a bien cédé son entreprise (ou une branche complète d’activité), condition sine qua non pour bénéficier de l’avantage fiscal.

La réponse est non, selon le juge de la cour d’appel : en l’absence de vente des bâtiments, il convient d’examiner les modalités d’usage convenues pour déterminer si, en l’état, le fils peut exploiter l’activité de façon autonome, dans les mêmes conditions que son père.

Tel n’est pas le cas, puisque le bail de 9 ans consenti par le vendeur n’est pas, à proprement parler, un bail longue durée, quand bien même il serait reconductible.

En conséquence de quoi, le redressement fiscal est maintenu.

Il est important de préciser que dans cette affaire, le juge d’appel semble en désaccord avec le juge suprême. Il y a donc fort à parier que l’affaire soit de nouveau portée devant le juge suprême…affaire à suivre…

Source :

  • Arrêt du Conseil d’Etat du 8 décembre 2017, n°407128
  • Arrêt de la Cour Administrative d’Appel du 18 juin 2018, n°17NT03689

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